SHILPA GUPTA

° 1975

Vit à Mumbai (IN), né à Mumbai (IN).

Shilpa Gupta : dualité terrestre 

L’artiste indienne Shilpa Gupta termine ses études de sculpture à la Sir J.J. School of Fine Arts de Bombay en 1997. En 2015, elle est invitée à participer à la Biennale de Venise, où elle expose son œuvre dans l’exposition My East is Your West [Mon Est est ton Ouest] dans le Palazzo Benzon. La dualité qui se trouve dans le titre représente parfaitement la nature de son travail. Gupta réalise des œuvres d’art qui examinent les relations humaines, la subjectivité et la perception par le biais de thèmes comme les désirs, le conflit, les frontières et la censure. Son œuvre est polyvalente et souvent aussi interactive. Elle n’essaie pas vraiment de présenter au spectateur une manifestation esthétique de ses idées, mais plutôt de le mettre au défi d’engager le dialogue avec la réalité représentée. 

Gupta utilise dès le début des médias tels que la sculpture, les installations, les textes et la photographie, par le biais desquels elle démontre toute la maîtrise des possibilités audiovisuelles contemporaines. Elle considère la technologie comme le prolongement à la fois du corps et de l’esprit et fait preuve d’une conscience affûtée à propos du rôle psychologique et esthétique de toutes les formes de médias existantes. Même si son œuvre fait souvent référence à la situation sociale et politique d’un contexte culturel spécifique, Gulpa laisse la porte grande ouverte à toutes les formes d’interprétations pour que son œuvre puisse être exposée et interprétée à n’importe quel endroit ou moment.

Les frontières la fascinent énormément. Des frontières géographiques et politiques aux frontières sociales et personnelles. Elle s’intéresse à la perception humaine, à la manière avec laquelle nous regardons les autres et nous-mêmes et à la façon avec laquelle nous nous définissons. Avec relativement peu de moyens (un fil de coton ou une seule phrase), elle parvient à donner au spectateur une clé vers son propre univers d’associations et d’images. Elle encourage le spectateur à prendre position à propos de sa relation avec l’œuvre et le monde.

La notion de « frontière » est ainsi très souple. Son pays natal, l’Inde, est souvent le point de départ, mais elle se concentre surtout sur la mondialisation et les questions sociales et politiques qui y sont associées. À une époque où le monde est à portée de main et où les distances sont de plus en plus faciles à parcourir, les frontières nationales semblent devenir de plus en plus fortement délimitées. Gupta pose des questions sur ces frontières nationales artificielles qui sont souvent plus jeunes que les cultures qui y vivent. Elle appelle son travail l’everyday art [art de tous les jours], car elle réagit directement à ses observations et associations quotidiennes.

En plus de dessins, de croquis et de photos, elle réalise aussi des sculptures de grande taille qui prennent des formes morphologiques abstraites. Elle les associe à des installations sonores avec une esthétique visuelle particulière : des dizaines de microphones identiques qui pendent du plafond et qui sont accompagnés de feuilles A4 empalées avec des textes poétiques. Après qu’une voix invisible a déclaré que « without revolution, there can be no proper peace » [sans révolution, il est impossible d’avoir une véritable paix], toutes sortes de textes sont murmurés en même temps à travers les haut-parleurs, formant un bourdonnement amical qui descend dans l’espace à l’instar d’un chœur. Le spectateur se sent emprisonné dans un monde intangible qui l’entoure, alors que la poésie politique forme un contraste avec la configuration statique de l’installation. 

Elle crée une même dualité en proposant une pile de morceaux de savons doux sur lesquels est inscrit THREAT (menace) avec de grandes lettres. L’œuvre fait un peu penser à un petit monolithe constitué de barres de savon qui ressemblent à de grandes briques en termes de taille et de forme. En incitant le spectateur à prendre une barre de savon, l’œuvre grandit à l’échelle mondiale et le spectateur se transforme en propriétaire de l’objet. La question qu’elle semble poser est si la « menace » peut être démantelée et rincée morceau de savon par morceau de savon. 

Les dernières expositions individuelles de Shilpa Gupta ont eu lieu à Barbican, Londres (2021) ; Dallas Contemporary (2021) ; M HKA, Anvers (2021). En 2019, Gupta a participé à la 58e biennale de Venise, dont le curateur était Ralph Rugoff. En 2019, elle a reçu le prix GQ Cultural Provocateur Award ; en 2018, elle a été désignée « Today’s New Media Artist of the Year » (Artiste contemporain des nouveaux médias de l’année) en Inde. Les œuvres de Gupta sont notamment conservées dans des collections au Guggenheim, New York ; Museum of Contemporary Art, Chicago ; Centre Georges Pompidou, Paris ; Mori Art Museum, Tokyo et dans la Fondation Louis Vuitton, Paris et au M HKA, Anvers. 

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